Sept collégiens de l’atelier radio ont travaillé, en partenariat avec Radio Libres Périgord, sur des thématiques inhérentes au quartier dans lequel se situe leur collège Jean Moulin. Les grands ensembles populaires de la ville Coulounieix-Chamiers, en Dordogne, vont être rasés pour laisser place à un quartier neuf. Les élèves se sont alors intéressés aux problématiques qui touchaient directement les habitants de ce quartier, dans leur podcast « Politique de la ville » de 25 minutes.
Le projet Les Apprenti·e·s est un programme d’éducation aux médias développé par l’association Les Ami·e·s de Far Ouest. Dans ce feuilleton, nous donnons la parole à des jeunes qui s’essaient à l’écriture ou l’audiovisuel. Que leurs réalisations soient d’initiatives scolaire, associative ou individuelle, notre plateforme les valorise. Les élèves du collège Jean Moulin de Coulounieix-Chamiers reviennent sur le podcast « Politique de la ville », à retrouver sur Radio Libres en Périgord.
À Coulounieix-Chamiers, une grande barre d’immeuble de la cité Jacqueline Auriol est vouée à la destruction. Sept élèves du collège Jean Moulin, à quelques pas du quartier, ont alors réalisé un podcast autour de ces travaux. Maël, aujourd’hui élève de quatrième, a été touchée par les témoignages des habitants : « Une dame nous a dit qu’elle habitait ici depuis qu’elle est née, depuis que le quartier est construit, avec toute sa famille. Elle avait beaucoup de souvenirs et était triste que l’on démolisse son quartier. » À raison de six séances le midi en trois semaines, en plus des interviews et de l’enregistrement en studio, les journalistes en herbe ont fait un épisode sonore de 25 minutes.
En 2018, sept collégiens de cinquième se sont portés volontaires pour participer à cet atelier avec Radios Libres en Périgord. L’animatrice de cette radio locale associative, Élisa, a accompagné les élèves au long de ce projet. Elle leur a présenté le thème : « Politique de la ville ». « On ne leur a pas expliqué ce que c’était concrètement, donc ils ont peut-être pris un peu peur au début. Il a fallu qu’on joue un peu sur les mots pour leur faire comprendre. »
« J’avais le trac ! »
Marie Clemens est professeure d’histoire-géographie au collège Jean Moulin et s’occupe de l’atelier radio. Elle se rappelle cette première séance de discussions autour du sujet : « On leur a montré des choses concrètes et c’est ce qui a suscité leur intérêt, alors qu’à première vue, le thème n’était pas évident. » Car derrière ces grands mots, « politique de la ville », se cache une réalité : 201 logements sociaux seront détruits, 312 réhabilités, pour que 200 habitations non sociales soient rebâties dans la cité Jacqueline Auriol. « Ce sont les élèves qui ont trouvé l’angle du sujet. » En effet, les collégiens ont choisi de focaliser leur reportage sur les habitants du quartier. « Leur grosse préoccupation était de savoir comment vivent les gens qui vont voir leur maison démolie. »
Les questionnements soulevés lors de cette première séance ont permis aux élèves de comprendre l’enjeu du sujet. Pour la journaliste radio Élisa, travailler sur ce quartier prioritaire fait partie des valeurs de Radios Libres Périgord, « de donner la parole à ceux qui ne l’ont pas forcément, de faire connaître les problèmes de chacun et des collectivités ». Il s’agissait aussi d’intéresser les élèves à des questions quotidiennes et intergénérationnelles, comme en témoigne Zoé, une des élèves : « Nous avons rencontré des personnes que nous ne connaissions pas avant, qui nous ont appris des choses. »
Maël témoigne de la difficulté du groupe à « formuler les questions » pour les interviews. Les apprentis journalistes ont donc été aiguillés par Élisa et ont cherché ce qu’ils voulaient savoir de ces habitants pour répondre à leur sujet. « Depuis combien de temps vivez-vous dans ce quartier ? », « Quel est votre meilleur souvenir ici ? », « Déménager va vous déranger dans votre vie quotidienne ? » Autant d’interrogations pensées par les élèves que l’on peut entendre dans ce podcast. « Des mots-clés nous ont aidés à préparer les questions, explique Zoé : où, quand, comment, qui, quoi ». Les interrogations basiques que les rédactions appellent les « 5 W ».
Si les interlocuteurs avaient été choisis par la professeure Marie Clemens et l’intervenante Élisa, les élèves ont proposé eux-mêmes d’interroger le maire Jean-Pierre Roussarie. Au micro, les élèves lui demandent alors la raison de ces travaux, ou si l’élu a « une idée de ce que certains habitants du quartier peuvent ressentir ». Leïla, qui faisait partie des élèves participants, a été marquée par son interview : « C’était plus simple de poser les questions, mais j’avais le trac, car c’était la première fois que j’allais voir le maire, donc c’était important ! »
La découverte du studio
Après avoir terminé les interviews, les sept élèves se sont rendus dans les locaux de Radios Libres Périgord pour finaliser l’émission et enregistrer les voix off, qu’ils ont eux-mêmes rédigées : « C’était beaucoup de lecture pour eux : la présentation, les transitions… se souvient l’animatrice Élisa. On essaie de simplifier les choses, mais ils étaient contents de découvrir un studio ! » Léna, élève au collège Jean Moulin, était enthousiaste lors de sa venue au studio pour cette septième et dernière séance : « C’était la première fois pour moi. J’avais déjà vu comment c’était dans les films, mais jamais en vrai. Alors ça m’a motivée ! » Les adolescents ont participé à la technique, en maniant eux-mêmes l’enregistreur et observé les coulisses du journalisme radio, comme le placement des jingles.
Ils avaient envie de montrer une bonne image d’eux, et étaient à l’écoute des remarques qu’on leur faisait.
Cet atelier auquel les élèves ont participé, hors du temps scolaire, avait pour vocation première de leur faire travailler l’oral, explique leur professeure d’histoire-géographie Marie Clemens, mais aussi effectuer « une démarche citoyenne en s’impliquant dans la vie du quartier dans lequel se situe leur établissement, et en allant vers les gens qui l’habitent. » La collégienne Léna y a vu une autre opportunité : elle qui n’avait « jamais participé à un travail de groupe » et appréhendait cette dimension collective a apprécié « partager les tâches et donner son avis ».
La journaliste s’étonne surtout de leur sérieux en réalisant ces tâches : « Un ou deux étaient excités, mais passés derrière le micro, ils se sont instantanément calmés ! » Leur professeure, Marie Clemens, a aussi remarqué ce changement de comportement de la part de ces élèves qui « souvent, n’ont pas confiance car ils sont en difficulté dans certaines disciplines. Faire cet exercice les a valorisés. » Elle note aussi une implication plus grande dans cet atelier d’éducation aux médias, sur la base du volontariat, que lors de « tâches purement scolaires : ils avaient envie de montrer une bonne image d’eux, et étaient à l’écoute des remarques qu’on leur faisait. »